Je suis une jeune fille de 16 ans. J’ai un petit frère de 11 ans.
Je cherche à témoigner que la parole des enfants lors de la séparation des parents n’est pas prise en compte.
J’ai eu une enfance difficile. Mon père était violent envers ma mère en paroles et en actes. Parfois devant nous. Pour mon frère et moi il ne témoignait pas d’affection, changeait vite d’humeur et se mettait dans des états de violences verbales qui nous terrorisaient.
J’avais 10 ans lorsque ma mère a décidé de se séparer définitivement. Je crois que, jusquelà, son mari avait du pouvoir sur elle sans qu’elle ne puisse s’en rendre compte car il la manipulait. Moi, par contre, j’avais compris depuis longtemps qui il était….
Il y a eu ensuite de longues années traumatisantes devant les tribunaux où mon frère et moi avons été écoutés sans que ce que nous disions ne soit pris en compte. Nous étions terrorisés d’aller chez notre père. On se sentait en insécurité avec lui suite à ce qu’il nous disait ou faisait. Nous avons dû nous répéter de multiples fois auprès d’experts psychologues ou pédopsychiatres et de la police. C’était très, très dur pour nous. Nous faisions beaucoup d’efforts et avions l’impression de ne jamais être compris. Très vite les tribunaux, avocats, experts ont conclu que parce que nous disions tous les deux la même chose et que j’avais des paroles ‘trop matures’ pour mon âge, notre maman nous montait la tête. Alors qu’en réalité c’était notre père qui essayait de nous convaincre contre notre maman et sa famille. Il se montrait irréprochable devant les professionnels et inventait n’importe quoi pour attaquer notre mère par tous les moyens. Nous trouvions cela tellement injuste car notre maman était là pour nous. Elle nous donnait tout l’amour et les soins dont nous avions besoin. Ce n’était pas reconnu.
Ce que je n’ai jamais compris c’est pourquoi la justice, les experts et le centre d’accueil pour enfants - eh oui il a fallu en arriver là ! - où nous avons été finalement mis en observation pour évaluation de la situation, mettait en cause la seule personne qui nous protégeait : notre mère. Chez elle on se sentait en sécurité. Chez notre père nous souffrions, nous avions la peur au ventre. Cependant, tous les intervenants nous disaient qu’on a besoin d’un père, que c’est l’intérêt de l’enfant de maintenir un lien. Alors que je trouve que si on se sent en insécurité chez ce parent violent, on ne peut forcer les enfants à y aller à tout prix.
Ce qu’on m’a dit c’est qu’on ne prend vraiment en compte ce que l’enfant dit qu’à partir du moment où celui-ci tente de se faire du mal(!), ou que l’on peut prouver que le parent est physiquement violent envers son enfant. Pour le reste on nous disait qu’on exagérait ! À la suite de cela, j’ai vraiment pensé me faire du mal…
Mon frère et moi avons tellement souffert de toutes ces longues procédures ! Elles ont mis notre mère à très rude épreuve et ont donné trop de place à ce père violent par rapport à l’écoute qui nous a été faite. Ne fallait-il pas analyser son profil psychologique et arrêter de croire que parce que c’est notre père il est bon qu’on le voie ? Les traumatismes que nous avons vécus ont été renforcés par l’incompréhension de beaucoup de professionnels qui ne suivaient que leurs théories, leurs croyances.
Ecoutez les enfants, tenez compte de leur vécu, surtout dans les situations de violence verbale ou/et physique entre leurs parents. Pourquoi ne serions-nous pas, nous les enfants, capables de reconnaitre les personnes qui nous font du mal ?
